Une actu, un outil, un webinaire… et puis s’en vont ! La CFPSAA tire la sonnette d’alarme
La CFPSAA tire la sonnette d’alarme sur une solution dite, innovante, en terme d’accessibilité !
Si l’accessibilité numérique résidait dans un outil interactif, les aveugles le sauraient !
C’est pourtant ce que certains voudraient faire croire en éludant la complexité du problème. Ce problème est bien connu de la CFPSAA et de ses associations, toutes dédiées à la vie quotidienne des personnes aveugles et malvoyantes. Nous menons un combat de longue haleine pour l’accessibilité numérique, particulièrement dans le domaine public. La loi nous a déjà entendus. Elle impose, depuis 2005, l’accès à tous les sites internet publics par les personnes handicapées. La réalité n’est pas aussi simple : les problèmes de coûts et les prétendus problèmes techniques servent souvent de paravent au retard constaté dans la mise en conformité de nombreux sites. Nous ne baissons pas la garde et continuons inlassablement d’expliquer à tous les niveaux qu’ils soient politiques, conceptuels ou techniques, que la seule solution se situe dans le « nativement accessible ».
Et voilà que l’UGAP (Union des Groupements d’Achats Publics) organise un Webinaire sur le thème de « l’accessibilité numérique » , le 9 février prochain. L’initiative est louable, mais, pour ce faire, l’UGAP a sélectionné la startup FACIL’iti, qu’elle présente comme « le spécialiste » français dans ce domaine et qui vient proposer un focus dédié à « l’accessibilité des contenus numériques pour les personnes en situation de handicap visuel, cognitif ou moteur ». Là, nous sommes étonnés : FACIL’iti, le spécialiste français ? Il y a peut-être du nouveau ? Oui, il y en a : FACIL’iti propose une solution innovante, qui « adapte l’affichage d’un site Web en fonction des besoins de confort visuel, moteur, cognitif, et/ou temporaire de l’internaute ». Là, nous sommes furieux : l’outil proposé n’est pas porteur lui-même, d’accessibilité, il permet tout au plus, un peu de confort pour certains utilisateurs, mais ne rend pas un site inaccessible, accessible !
Sans vouloir dénigrer l’innovation sympathique que peut représenter cet outil de confort, nous ne pouvons pas laisser passer une telle information qui tendrait à faire croire que les problèmes sont évacués d’un coup de baguette magique et qu’un gadget supplée au processus que représente la conception et la création d’un site accessible. Si cela était vrai, nous en serions très heureux.
Ce que nous dénonçons par la présente alerte c’est le fait même que l’UGAP ait procédé à ce choix. Cela nous paraît révélateur de la manière dont on évacue la question de l’accessibilité en haut lieu. Le pouvoir en place, celui-là même, qui semble nous donner des garanties, celui-là même qui s’est engagé à rendre accessible 80 % des 250 démarches administratives les plus utilisées par les usagers à l’horizon 2022, serait-il tenté par le désengagement et l’hypocrisie ?
En aucun cas, un outil de confort ne peut se substituer à l’accessibilité fondamentale. Il ne peut exonérer de l’obligation légale de rendre accessibles les sites et plateformes qui entrent dans le champ de la loi. Induire l’idée que l’on peut surseoir, une fois de plus à l’application pleine et entière de règles qui sont édictées au niveau national, européen, et international, c’est nier la citoyenneté des personnes handicapées, c’est participer à la discrimination et c’est assumer cette discrimination !
Rappel
- Au niveau international : la convention des Nations Unies pour les droits des personnes handicapées ratifiée par la France en 2010 dans son article 9.
- Au niveau européen : outre la directive UE 2016/2102 sur les sites web d’organismes publics, la stratégie numérique de 2010, la stratégie européenne en faveur des personnes handicapées 2010-2020 ou encore la directive de 2014 sur les marchés publics (article 60) évoquaient déjà l’accessibilité numérique.
- Au niveau national : la loi du 11 février 2005 posait déjà ce principe dans son article 47, modifié par l’article 106 de la loi pour une République numérique du 7 octobre 2016.